2. La décision de poursuivre
En vertu de la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales (chapitre D-9.1.1), le directeur des poursuites criminelles et pénales a pour fonctions d’agir comme poursuivant dans les affaires découlant de l’application du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46), de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (L.C. 2002, c. 1) ou de toute autre loi fédérale ou règle de droit pour laquelle le procureur général du Québec a l’autorité d’agir comme poursuivant, de même que dans toute affaire où le Code de procédure pénale (chapitre C-25.1) trouve application. Dans l’exercice de ses fonctions de poursuivant, il est représenté par les procureurs aux poursuites criminelles et pénales qui quotidiennement ont comme devoir d’agir pour le poursuivant, en son nom, et d’autoriser ou non les poursuites criminelles et pénales.
La décision d’autoriser une poursuite ou de déposer un acte d’accusation est de loin la plus importante que prend le poursuivant car une mauvaise décision à cette étape peut miner la confiance du public dans le système de justice pénale et être lourde de conséquences pour les personnes en cause.
Après s’être assuré qu’il existe une infraction en droit et qu’il peut légalement en faire la preuve, le poursuivant doit porter des accusations, à moins qu’il ne juge inopportun de le faire dans l’intérêt public soit en raison des circonstances particulières du dossier, soit en raison de l’application de programmes sur le traitement non judiciaire des infractions.
Eu égard à cette responsabilité du poursuivant, nous faisons nôtres les propos suivants que tenait l’honorable Dickson, ex-juge en chef de la Cour suprême du Canada:
«La décision ultime de poursuivre ou de ne pas poursuivre un particulier et, dans l’affirmative, relativement à quelles infractions, exige qu’on évalue soigneusement une foule de considérations locales, y compris la gravité de la conduite reprochée en regard des normes de la collectivité, les conséquences possibles d’une poursuite pour le particulier, l’avantage que la collectivité peut tirer de la poursuite, la possibilité de récidive et l’existence d’autres mesures comme, par exemple, la déjudiciarisation ou les programmes spéciaux de réhabilitation. L’évaluation de ces facteurs exige de toute évidence la compréhension des conditions qui prévalent dans la collectivité où l’acte criminel a été perpétré.» (R. c. Wetmore [1983] 2 R.C.S. 284, 306).
La décision d’autoriser une poursuite criminelle ou pénale doit donc être prise en tenant compte, pour chaque cas d’espèce, des multiples intérêts en présence, autant ceux de la société que ceux de la victime et du prévenu ou du défendeur. Cette décision doit toujours se prendre dans une atmosphère dénuée de passion, être la plus objective possible, être empreinte de fermeté et de compréhension, au besoin, et cela, non seulement au moment d’autoriser une poursuite, mais tout au long du processus qui s’ensuit, y compris en appel le cas échéant.
Décision 2007-03-15, a. 2.